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Masters 2024 : la rentrée des seniors

© Alice Alvarez - Reproduction interdite

Pour une majorité de patineurs, les traditionnels Masters signent le retour à la compétition après la trêve estivale. Trêve mise à profit pour le montage des programmes que nous découvrons ces jours-ci.

Après la séparation du couple Piegad/Strekalyn (Océane est contrainte de suspendre sa carrière pour être opérée d’un pied), les couples seniors ne sont plus que deux. Les époux Kovalev ont le sourire, mais c’est un sourire crispé. Ils sont encore en plein rodage, après une sévère blessure de Pavel à la cheville qui a nécessité un arrêt complet, et une autre, plus récente, au dos (voir l’interview du couple sur Skate Info Glace (Opens in a new window)). Sur une intéressante version de “Toxic” de Britney Spears, interprétée par 2Wei et arrangée par Maxime Rodriguez, Camille chute sur le triple flip lancé du programme court. Et se blesse à l’épaule gauche ! Vraiment pas de chance. 3 points de déduction (chute et interruption du programme court) viennent grever le score (42.75). Ils participent néanmoins courageusement au libre, avec une reprise de leur programme de l’an dernier sur le thème de James Bond. Même chute sur le même élément pour Camille et dépassement de temps. Ils sont seconds (94.88) comme jeudi et occuperont la deuxième marche du podium (137.63), loin de leur niveau habituel. Aurélie Faula et Théo Belle patinent leur court sur “I’ll take Care of You” de Beth Hart & Joe Bonamassa. Trois erreurs minimes à leur actif : sur le double twist, le triple boucle lancé et la pirouette, sans impact majeur sur le score : 57.40. C’est même leur record personnel. Dans le libre, sur “Mon Amour” de Slimane et le Concerto d’Aranjuez, Aurélie chute à la descente du triple twist, pose la main sur la glace à la réception des triples boucle et Salchow lancés et la pirouette combinée oscille un peu. Mais le programme est intelligemment construit, bien patiné et le couple a fait d’énormes progrès depuis l’an dernier. Avec 100.45, score très au-dessus de celui de leur dernier Challenger Serie (87.51 au Lombardia Trophy) pour un total 157.85, les représentants des Français Volants gagnent leurs premiers Masters.

Après une saison 2023/24 aux accents de catastrophe, Kevin Aymoz revient de loin et à tout à (re)prouver. Son programme court, sur “Everybody” de Martin Solveig, pète le feu. Kevin attaque par un quadruple boucle piqué avec une main qui frôle la glace, combiné à un double. Il est ensuite victime d’une lourde chute sur le triple Axel, dont il met du temps à se relever. Il serait pourtant capable de réussir ce saut dans son sommeil, c’est un de ces grands points forts techniques. Le reste du programme est nickel-chrome, avec une formidable séquence de pas notée +4 sur toute la ligne. Il mène le bal avec 83.38. Kevin est connu pour littéralement poser ses tripes sur la glace à chaque prestation. Ce sont hélas les fesses qu’il pose sur la glace de Villard de Lans lors du libre. Triple boucle : dégradé car incomplet. Chute avec choc dans la barrière sur le quad boucle piqué. Triple Lutz : atterri sur deux pieds et dégradé. Triple Axel éclaté. Second triple Lutz (avec chute) invalidé pour répétition. Il cumule chute, dégradation et carre douteuse sur le triple flip, et sa pirouette finale est jugée invalide. On ne sait pas si ce qui lâche est les jambes ou la tête. Ou les deux. Il semble redouter de rater ses sauts. Ce qui le conduit à… les rater. Car tout le reste du programme est parfait : glisse pure, vitesse, élégance, sensibilité, virtuosité, émotion, créativité, ses domaines d’excellence. Mais avec 6 déductions, il se retrouve dixième et avant-dernier du libre. Dire qu’il n’a rien à faire coincé entre Ian Vauclin et Théo Baradel est un euphémisme. Score : 84.33. Son libre des championnats du Monde 2023 lui avait valu 187.41 points… Cette contreperformance, à l’image de l’an dernier, peut s’expliquer par plusieurs facteurs. La condition physique de Kevin a, par le passé, été sévèrement ébréchée par des blessures à répétition. Son moral s’est effrité au passage, les deux étant intimement lié. La peur d’une nouvelle lésion peut vous bloquer sur les deux plans, physique et mental. Kevin est un homme intelligent, très intuitif, passionné. Je ne pense pas qu’il ait perdu l’envie de patiner en compétition. D’ailleurs, ses entraînements et “warm ups” se sont très bien passés. Il se présente dans le Kiss & Cry en baskets. Problème de patins ? Douleurs à une cheville fragilisée par une ancienne lésion ? Ou simplement, revenir de si loin est une épreuve qui lui a coupé les jambes. On l’a vu ces jours-ci derrière la rambarde, en tant que chorégraphe de Mila Bertsch. Il s’est également occupé des programmes de Ninon Dapoigny et du court de Davide Lewton-Brain. La chorégraphie est un métier chronophage, énergivore, peut-être n’a t’il pas eu le temps de se préparer correctement. Rendez-vous le samedi 19 octobre au programme court du Skate America.

De bon patineur, Luc Economidès, en quelques saisons, est devenu brillant. En civil, il se tient le dos droit et le menton haut, comme un danseur de ballet ou un mannequin. Sur la glace, il rayonne. Son passage par les Mondiaux de Montréal lui a conféré une nouvelle assurance et une nouvelle aura. Son programme court sur “Hier Encore” de Charles Aznavour est savoureux. Triple Axel haut et léger, triple flip, combinaison triple Lutz (carre douteuse)/triple boucle piqué. Sa séquence de pas est récompensée d’une ligne de +3 et +4. Avec 83.24, il est sur les talons de Kevin. Les choses se gâtent lors du libre, exécuté sur “Interstellar” de Hans Zimmer. Départ en retard (1 point de déduction), triple Lutz en carre douteuse, erreur sur le triple boucle, chute sur un triple Axel invalide car répété, une autre carre douteuse sur un double Lutz, une pirouette invalide. Voici pour le négatif. Le positif, ce sont ses énormes progrès en composantes (75.56 contre un TES à 54.52). Avec 128.08, il descend à la 5ème place du libre. Un total général de 211.32 le classe second de ces Masters, place amplement méritée.

Mais alors, qui gagne la compétition ? François Pitot. Et avec la manière, dans le libre en particulier. On a déjà beaucoup entendu le “Libertango” de Piazzolla et ce, depuis des lustres. Mais François est un bon interprète, doublé d’un patineur ambitieux. Il ouvre son court par quadruple Salchow et s’il le loupe, il a tout de même eu le cran de le tenter. Il chute également sur le triple Axel. 5ème avec 71.35, il va effectuer, le surlendemain, une très belle remontée. Son libre, sur “Matrix”, “Sarajevo” de Max Richter et “Taught” de Power Haus, est plein d’émotion. Et de difficultés techniques. Il tombe de nouveau sur le quad Salchow, écope d’un “edge” sur le triple flip, son triple boucle est en sous rotation, et le tout est assorti d’un dépassement de temps, erreur commune en début de saison quand les programmes ne sont pas encore rodés. François gagne le libre avec 151.22, soit plus de 16 points devant son premier poursuivant. Il sera à surveiller de près au Skate America. A noter : l’année où Brian Joubert a été champion d’Europe et vice-champion du Monde avec “Matrix” (2004), François Pitot n’était pas né (source Solène Mathieu, S.I.G.). Comme le temps passe !

Corentin Spinar est 3ème de la compétition avec 206.57. 4ème du court (72.83), il gagne une place dans le libre (133.74) avec un découpage musical de “Robin des Bois” qui fait grincer des dents. Ses deux programmes sont exempts de chute ou d’erreur majeur, ce seront même les plus propres de la compétition. Samy Hammi, 6ème jeudi (67.83), grimpe allègrement au second rang du libre (135.00) avec “Fortitude” de Haevn, pour terminer 4ème (202.83). Samy est, depuis plusieurs saisons, sur une courbe ascendante. Particulièrement léger et énergique sur la glace, il fait preuve d’une grande solidité. Il devrait faire parler de lui à l’avenir. Landry Le May est 5ème (200.46) après avoir été un très beau 3ème du programme court (78.21). Il recule de trois places (122.25) lors du libre avec deux chutes : triple Lutz, triple flip en “quarter” et un triple boucle dégradé. Landry est toujours aussi “dandy”, aussi élégant, mais il tarde à franchir un vrai cap technique.

En l’absence de Léa Serna, blessée, et Maïa Mazzara (?), Lorine Schild, sauf catastrophe, est assurée de la victoire. Elle va pourtant se battre comme un petit soldat. Dans le programme court, sa version du “Laissez moi Danser” de Dalida par Izia et Ibrahim Maalouf est une trouvaille. Rien à voir avec l’originale disco et datée. La mélodie est douce, mélancolique, la chorégraphie soignée et signée Gabriella Papadakis. Lorine est très rapide et j’aime son style de patinage, solide et épuré. Le triple boucle de sa combinaison (avec un triple Lutz) est en sous rotation mais ce sera sa seule erreur. 63.30 l’installent sereinement en tête. Sur la B.O. de “The Lion Woman” et une chorégraphie de Benoît Richaud, son libre est aussi délicat et émouvant que celui de l’an dernier. Un peu moins propre que le court (“quarter” sur la combinaison, triple boucle encore en sous rotation, chute sur le triple Salchow), sa prestation lui rapporte 108.60 et un total de 171.90, laissant ses concurrentes loin derrière elle. Concurrentes qui n’auront pas démérité. La sculpturale Clémence Mayindu obtient 136.25 au total et la 2ème place, devant Sophia Maarouf (116.58). Les deux jeunes femmes ont opté, dans leur libre, pour des chansons engagées : “N”insiste pas” de Camille Lellouche et “A la Gloire des Femmes en Deuil” de Mathilde pour Sophia ; “Ne me Jugez Pas” de Camille Lellouche pour Clémence. Bravo. Le patinage n’est pas un milieu tendre envers les femmes, les lignes commencent seulement à bouger, il est important de s’en souvenir et de continuer à avancer.

Kate Royan

Vidéos

Programme libre Camille et Pavel Kovalev (Opens in a new window)

Programme court Luc Economidès (Opens in a new window)

Programme court Kevin Aymoz (Opens in a new window)

Programme libre Kevin Aymoz (Opens in a new window)

Programme court Lorine Schild (Opens in a new window)

Programme libre Lorine Schild (Opens in a new window)

Programme libre dames seniors en entier (Opens in a new window)

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