Finale du Grand Prix 2024 Grenoble - Confirmations, surprises et grande première !
En ce début d’après-midi gris et pluvieux, ces dames seniors sont les premières à occuper la glace. Inconstante par le passé, Amber Glenn, cette saison, fait taire ses détracteurs. Le thème de son libre, “I will find You” d’Audiomachine, doux et tendre, un peu triste mais pas trop, se prête beaucoup mieux à l’amélioration de ses transitions que celui de son programme court. Un gros travail a été effectué depuis sa première sortie au Lombardia Trophy, qu’elle avait gagné, à l’automne. Elle met du temps à préparer son triple Axel mais ça valait la peine, il est superbe. Le triple flip en combinaison est un peu neigeux, mais sans déduction. Le triple Lutz/triple double boucle piqué est, lui, très propre. Amber effleure la glace de la main à la réception du triple Salchow qui se mue en double. Les GOEs baissent sans tomber dans le négatif. Le triple flip en quarter est sanctionné. Tous les autres éléments sont bien réalisés. L’Américaine remporte le libre haut la main avec 142.03 et gagne sa première Finale (212.07).
Mone Chiba, sur le Concerto Ariana N°1 de César Franck, a une patinage plus fin que celui d’Amber, mais moins de personnalité. Je suis souvent perplexe devant sa technique de sauts qu’elle va chercher très bas. Mone commet ses désormais classiques erreurs de carre sur les Lutz, auxquelles s’ajoute un quarter pour le triple boucle. Avec 139.52, elle est deuxième du libre et médaille d’argent (208.85).
Kaori Sakamoto, 4ème hier, n’avait sûrement aucune envie de se passer de podium ! J’ai horreur de la musique de cabaret, “All that Jazz” et Chicago ne sont donc pas ma tasse de thé. Mais Kaori s’exprime aussi bien dans ce registre que sur des partitions plus contemporaines, ou au contraire plus classiques. Son double Axel n’a que peu de hauteur, mais sa détente en longueur est remarquable. Si ses compatriotes se spécialisent malgré elles dans la carre douteuse, Kaori, aujourd’hui, s’offre une petit collection de sous-rotation. Et une carre douteuse quand même. Il va lui en coûter quelques grades d’exécution négatifs. Pas de quoi l’empêcher d’obtenir un score de 137.15 et une médaille de bronze (201.13).
Wakaba Higuchi, elle non plus, ne se laisse pas abattre. La vice-championne du Monde 2018 était dernière hier. On se doutait qu’elle tenterait une remontée. Mission accomplie. Peut-être pas aussi haut qu’elle le souhaitait, mais elle est 4ème du libre (134.35) et de cette Finale (195.96). J’aime beaucoup sa musique, “Nature Boy” de Aurora, et une version épique du “Running Up That Hill” de Kate Bush. Il y a là ce qu’il faut d’harmonie et de montée en puissance pour mettre en avant toutes ses qualités. Son triple Salchow se transforme en double, et le triple flip est réceptionné sur la mauvaise carre. Tout le reste du programme est immaculé. Son score technique est d’ailleurs plus élevé que celui de Kaori.
Hana Yoshida tente un triple Axel auquel il manque un quart de tour, puis enchaîne un autre quarter et deux carres douteuses. Sa version de “SOS d’un Terrien en Détresse” par la troupe du Cirque du Soleil est agréable à l’oreille. 129.79 récompensent une prestation en demi-teinte. Hana est 5ème du classement final avec 194.02.
Rino Matsuike recule d’un cran pour prendre la place de Wakaba Higuchi en queue de peloton. Sa musique, “Lux Aeterna” de Christopher Tin (auteur très en vogue dans le patinage asiatique cette année), est un tout petit peu soporifique. 126.39 la classent en 6ème position du libre comme du classement général (189.02).
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Chez les messieurs juniors, tout le monde attend Rio Nakata grand vainqueur. Nous aurons… Jacob Sanchez ! Le Japonais, en tête la veille, l’aura bien aidé, en plongeant à la 4ème place du libre. Son “Pirate des Caraïbes” est émaillé d’erreurs et de GOEs négatifs : main posée sur la glace à la réception du quad boucle piqué, vilain triple Axel éclaté en simple, un non moins laid triple boucle lui aussi passé en simple, un triple flip branlant et, pour finir, des déséquilibres dans les pirouettes. Avec 135.94 et 215.33 au total, Rio termine finalement à la 3ème place. Jacob Sanchez ne sera que 2ème du libre (148.14) avec un “Io Ci Saro” d’Andrea Boccelli assez réussi. Il retourne son triple Axel, et se prive de la combinaison prévue avec un triple boucle piqué. Mais le triple Axel/double boucle piqué suivant est correct. Un petit quarter sur le triple boucle, une carre douteuse pour le triple flip combiné, puis tout va mieux. Le flip et les deux Lutz sont passés en “Rippon” avec beaucoup de vitesse et de hauteur. Ce qui fait gagner l’Américain (en sus des erreurs de Rio Nakata) ?
La remontée de Minkyu Seo de la 5ème place du court à la première du libre (152.46) ! Inattendu, mais séduisant, le programme du Coréen sur un très classique “Singing in the Rain” est exempt d’erreur. On ne relève qu’un “edge” sur son triple Lutz. Il empoche une très belle médaille d’argent (215.33). Sena Takahashi est 3ème du libre (142.57) et 4ème au final (204.40). Ses “Quatre Saisons” ne resteront pas dans les annales du patinage, même si le programme est propre.
Yanhao Li évolue sur “Earned it” de The Weeknd et “Funny” de Nadim Naaman, deux chansons qui ne vont pas du tout ensemble mélodiquement parlant. Pas plus qu’au niveau thèmes. Mais mélanger la B.O. de “Cinquante Nuances de Grey” avec celle du “Fantôme de l’Opéra” est peut-être un nouveau concept. Après tout, Shaidorov en senior mélange bien Beethoven et A-Ha ! Yanhao encaisse deux chutes et deux quarters pour une 5ème place (129,46) et la même chose au classement général (201,63).
Lukas Vaclavik, 3ème du programme court, dégringole de trois places pour finir 6ème (103.64). De son premier saut éclaté - l’Axel -, aux pirouettes finales défaillantes, il massacre soigneusement son libre avec une constance dans l’accumulation de bourdes qui force le respect. Son grade d’exécution le plus élevé est +1. Il s’auto-éjecte allègrement au dernier rang de la compétition (176.36).
Remarque générale : messieurs, que vous soyez juniors ou seniors, par pitié, cessez de vouloir copier les glissades artistiques de Kevin Aymoz. Les siennes ont un sens chorégraphique et entrent dans la cohérence de ses programmes. Les vôtres donnent l’impression que vous vous traînez parterre.
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En danse junior, Noemi-Maria Tali et Noah Lafornara confirment leur première place de la danse rythmique. “Love Story” de Francis Laï est un thème bateau, mais nous sommes en catégorie junior, là où tout est encore à apprendre, peaufiner, développer. Les grades d’exécution sont bons, même si cette danse n’est pas exempte d’erreurs, et les niveaux sont hétérogènes : 4 pour les twizzles et les portés, 2 pour la séquence sur un pied, 1 pour Noemi-Maria sur la médiane, 3 pour son partenaire. 101.32 récompensent la prestation et un total de 169.98 leur offre la médaille d’or.
Les Américains Katarina Wolfkostin et Dimitry Tsarevski nous infligent un nouveau “Moulin Rouge” dans ses extraits les plus connus. Ils ont choisi une diagonale plutôt qu’une médiane et obtiennent les mêmes niveaux respectifs que les Italiens. Les twizzles de Katarina sont niveau 3, ceux de Dimitry montent au niveau 4. Ce libre est agréable à regarder, même s’il n’est pas original. 99.41 les placent seconds du libre et de la compétition (164.98). américains flotter sur les podiums !
Il va nous falloir endurer deux fois aujourd’hui la voix suraigüe du Kazakh Dimash Quderbaigen, et croyez moi, c’est éprouvant . En particulier sur l’Adagio d’Albinoni. La danse libre des Allemands Darya Grimm et Mikhail Staviskiy se laisse cependant regarder, à condition de se boucher les oreilles. Séquence sur un pied et serpentine de niveau 2, portés niveau 4, twizzles 4 pour elle, 3 pour lui. Ils restent à leur 3ème place (97.02) et gagnent le bronze (161.86).
Iryna Pidgaina et Artem Koval, remontent d’un cran (89.91). Revoilà la voix stridente de Dimash Quderbaigen qui, cette fois, saccage “SOS d’un Terrien en Détresse”. Si l’Adagio était douloureux, nous sommes ici purement dans la torture. Le programme en lui-même, chorégraphié par les anciens danseurs Oleksandra Nazarova et Maksym Nikitin, n’est pas inintéressant. Simplement, il rend 100% sourd après un long martyr. Les Ukrainiens, qui ne doivent plus avoir de tympans depuis longtemps, soufflent le 4ème rang final (152.27) au nez et à la barbe de Célina Fradji et Jean-Hans Fourneaux. Sur un “Exogenesis” à présent bien rodé, les Français sont auteurs de deux erreurs coûteuses sur les twizzles et la séquence sur un pied, ce qui descend leur score à 88.46. Ils terminent 5èmes (151.70). Ellian et Ethan Peal, et leur “Pearl Harbour” largement surjoué, restent 6èmes (82.89/143.08).
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Du changement aussi dans le classement des couples juniors : Olivia Flores et Luke Wang passent devant Jazmine Desrochers et Kieran Thrasher, raflant la médaille d’argent (103.78/155.82). La musique des Américains, “Lion King” vire à la cacophonie sur la fin, ce qui ne doit pas les aider à patiner. Les GOEs sont bas car le programme est parsemé de petites erreurs. Les Canadiens ont un thème moins convenu, et surtout moins junior, ce qui est à leur honneur : “Since I’ve been Loving You” de Led Zeppelin. Des chutes sur les deux sauts lancés, et deux quarter sur la séquence de sauts, expliquent leur recul. 3èmes du libre (97.54), ils sont aussi 3èmes de la compétition (152.82).
Romane Télémaque et Lucas Coulon sont de très beaux 4èmes (146.38), même s’ils ont perdu une place dans le libre (5èmes avec 95.04). Leur programme est, de loin, le plus original de la compétition couples juniors : “Breathing under Water” de Ghostwriter et “Mephisto’s Lullaby” de Xtortion Audio, une vraie pépite. Je salue vraiment l’effort d’originalité, les juniors, tout occupés à leurs efforts techniques, optant le plus souvent et logiquement pour des thèmes plus connus et plus faciles. Car ce libre est non seulement original sur le plan musical, mais la construction et la chorégraphie témoignent d’un travail très élaboré. Les deux patineurs sont très expressifs, ce qui n’est pas non plus l’apanage des juniors en général. La France tient, avec eux, un excellent couple qui peut à l’avenir grimper les échelons à vitesse grand V. Il y a des erreurs dans l’exécution, mais rien de rédhibitoire, ils peuvent être fiers d’eux.
Sae Shimizu et Lucas Honda sont 4èmes du libre (95,46 ; Romane et Lucas ne sont vraiment pas loin !) et 5èmes au total (145.66) avec une prestation sans grande saveur sur le “Clair de Lune” de Debussy. Le second couple canadien, Julia Quattrocchi et Simon Desmarais était 6ème du court et le reste (91.43/139.13). Sur le générique “Sign of Times” de Harry Styles, ils restent debout, mais n’ont qu’un seul triple à leur actif, le Salchow lancé. Leur double boucle lancé est le plus court que j’ai jamais vu. Julia est un tout petit gabarit, ceci explique cela.
J’ai gardé les meilleurs pour la fin : les Chinois Jiaxuan Zhang et Yihang Huang. Ils sont les logiques vainqueurs de cette Finale juniors avec 10 points d’avance rien que dans le libre (113.15) et plus de 20 au total (176.09). Leur musique “All for One” de Hael est très belle. Leur triple twist n’est que de niveau 2, pourtant il est d’une hauteur impressionnante. Yihang passe le double Axel en séquence en quarter et Jiaxuan pose les deux pieds à la réception du triple flip lancé. L’amplitude du triple boucle lancé est spectaculaire. Leur patinage est un régal de finesse. Ce couple s’inscrit dans la grande ligne des couples chinois et devrait faire beaucoup parler de lui, en bien, à l’avenir.
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Madison Chock et Evan Bates s’offrent leur Season Best (132.12) à l’issue d’une danse libre très bien exécutée. Ils ont le talent, et surtout l’expérience, pour être parfaitement à l’aise, même sur le tempo atypique de “Take Five”. Ils ont mérité leur médaille d’or (219.85) et ce n’est pas la dernière… Boston et les Jeux Olympiques n’attendent qu’eux. Personnellement, j’aurais préféré attendre Charlène Guignard et Marco Fabbri, mais leur libre de cette année et les juges en ont décidé autrement. Je l’aime pourtant, cette danse ultra créative sur “Robotboys”. Elle est d’autant plus remarquable que leur gestuelle, d’habitude ample et arrondie, a nécessité une complète refonte. Peut-être conviendrait-elle mieux à des danseurs de taille plus grande. L’idée n’est pas de moi mais de Geoffrey Brissaud, et elle est pertinente. Charlène et Marco ne sont que 3èmes du libre (122.99), doublés par des Canadiens remontés comme des coucous après leur RD ratée. Les Italiens remportent la médaille d’argent (206.11) mais avec plus de 13 points de retard sur Chock/Bates quand même.
Piper Gilles et Paul Poirier avaient leur revanche à prendre, voilà qui est fait (127.12). Je les préfère sur des thèmes plus mordants que “A Whiter Shade of Pale”, mais cette danse libre est belle, douce et délicatement patinée. Plombés par la 6ème place de la danse rythmique, Piper et Paul terminent 5èmes de la compétition (199.27). Lilah Fear et Lewis Gibson jouent un peu moins l’esbrouffe qu’en début de saison, ce qui ne fait pas de mal. Par le passé, nous avons eu Madonna, Lady Gaga, nous voici cette année avec Beyoncé. Et des chansons radio mainstream : “Halo”, “End of Time” et “Crazy in Love”. Ces standards de la pop sont clairement destinés à séduire le grand public qui, ne connaissant pas ou peu les règles de la danse sur glace, se laisse emporter par le côté populaire de la musique. Plus le public manifeste sa joie, plus les juges sont susceptibles d’être influencés puisqu’ils sont humains. (Mais si, je vous assure !) Tous les programmes du couple anglais sont une arnaque, mais une arnaque très bien ficelée, qui fait et refait ses preuves. Entendons nous bien, je n’ai absolument rien contre les deux danseurs qui sont des gens abordables, charmants et drôles. C’est leur perpétuel sur-classement qui me fait grincer des dents. Ils n’en sont pas responsables et auraient tort de s’en plaindre ! Ceux qui stagnent derrière eux tout en étant techniquement supérieurs ne se plaignent pas non plus, rodés qu’ils sont aux manoeuvres de la danse sur glace. La remontée de Piper et Paul pousse les Britanniques à la 4ème place du libre (122.87), mais ils montent sur la 3ème marche du podium (205.18).
Au final, la différence de points qui sépare Marjorie Lajoie/Zachary Lagha et Piper Gilles/Paul Poirier est minime : 199.84 contre 199.27. Avec 122.11, les cadets sont 5èmes du libre et 4èmes du classement général. Leur “Sound of Silence” de Disturbed est bien patiné, avec conviction et technicité, mais la voix grave et puissante de David Draiman semble les enfoncer dans la glace. La partie sur “Murky Solitude” de Karl Hugo, plus légère, leur convient mieux. J’aime le porté “leap of faith” de la fin, sans doute inspiré par celui de Virtue/Moir sur “Roxanne”. Il faut une grande confiance en son partenaire pour plonger ainsi dans les airs, à la rattrape moi si tu peux !
On a longtemps reproché à Evgeniia Lopareva et Geoffrey Brissaud leur manque d’unisson et leur faiblesse en composantes. Maintenant qu’ils se sont considérablement améliorés dans ces domaines, c’est en technique qu’ils se font allumer, alors que celle-ci n’a pas changé. Au contraire, elle s’est affinée. Les carres sont profondes, les lignes sont délicates, les pirouettes créatives. Ils évoluent toujours très près l’un de l’autre, beaucoup plus près que la plupart de leurs concurrents. Cette danse libre sur BFRND est non seulement un ovni musical, c’est aussi un bijou de chorégraphie, ciselé par nul autre que Guillaume Cizeron. Les GOEs sont bons, ce sont les niveaux qui restent moyens. Et quand ils montent, ce sont les GOEs qui descendent. Bref… Il va falloir attendre. Les Français sont 6èmes aujourd’hui (118.93) et 6èmes au final (195.91).
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L’avantage de l’âge mûr est d’avoir vécu de grandes premières dans les patinoires. Celle d’aujourd’hui est un programme à sept quadruples ! Soit toute la panoplie des sauts passée en revue et en quatre rotations. Dans les faits, les quatre tours n’y sont pas tous, réduits par des quarters et des sous rotations. Mais quand même… Ilia Malinin est un cas à part. Encore ce soir, il nous offre un quadruple Axel qu’il est le premier et le seul au monde à réussir en compétition. Visage de héros romantique mi ange mi démon monté sur un corps d’élégante araignée à la musculature d’un autre monde, doté d’une détente exceptionnelle, il ne brille toujours pas par sa sensibilité artistique, même s’il a fait de gros progrès de ce côté. Mais on ne peut pas tout avoir, ou pas encore, à 20 ans (depuis lundi). “I’m not a Vampire” de Falling in Reverse : la musique est joliment rock-ballad, Ilia fait un effort d’interprétation, jusqu’au costume, un peu “too much” avec ses éclaboussures rouges et sa découpe dans le dos qui évoque plus un poisson d’avril qu’un buveur de sang. Ilia est connu pour n’en faire qu’à sa tête. Il n’a pas tort, on n’est jamais aussi bien servi que par soi même. “QuadGod” donne, aujourd’hui, légitimité à son pseudonyme Instagram. Quad flip (quarter), quad Axel (quarter), quad Lutz en sous rotation orné d’une gamelle, quad boucle (sous rotation), quad boucle en combinaison (sous rotation), quad Lutz (sous rotation)/Euler/triple Salchow, quad boucle piqué (quarter), quad Salchow (quarter)/triple Axel en séquence. Oui, il manque pas mal de morceaux et la colonne erreurs de son score détaillé est presque aussi remplie que celle des éléments exécutés. Cela m’est égal, je suis partisane et je l’assume. J’aime la prise de risques et la nouveauté. Ilia finit hors d’haleine, allongé sur la glace. C’est vrai, il y a de quoi être un peu fatigué… Le programme est conçu calculette en main, pour scorer au maximum, avec à partir du 6ème élément, donc en seconde partie de programme ce qui vaut bonus, des combinaisons aux Base-Values qui crèvent le plafond, dont l’énorme 19.47 du quad Salchow/triple Axel en séquence. Ilia n’est que second du libre (186.69), preuve qu’il n’est pas imbattable, surtout quand il joue les têtes brûlées, mais il remporte sa seconde Finale de Grand Prix (292.12). Une fois tous ses quads nettoyés, s’il réédite l’expérience, il sera quasiment impossible à aller chercher. Parti pour au moins deux cycles olympiques, il restera le patineur phare des quatre ou cinq prochaines années.
Yuma Kagiyama avait 6 points de retard sur Malinin dans le programme court. Il a moins de 2 points d’avance dans le long, mais avec une prestation propre. “Ameksa” des Taalbi Brothers et “Romanza” de Karin Schaup sont ses choix musicaux de la saison. Yuma patine à cent à l’heure, modèle de finesse de glisse et de sobriété. Il m’évoque une rivière qui coule, même dans les plus grandes difficultés techniques. Quad flip, quad Salchow éclaté en double, quad boucle piqué/triple boucle piqué, triple Axel/Euler/triple Salchow, quad boucle piqué, triple Axel et triple flip/triple boucle rogné d’un tour et posé sur deux pieds. On remarque à peine les erreurs tant l’ensemble est limpide mais on a du mal à tenir sur son siège tant tout cela va vite. Là où les autres patinent, Yuma vole… Il est logiquement 1er du libre avec 188.29, et second de cette Finale (281.78).
Shun Sato grimpe une marche pour atteindre la 3ème place du libre (184.54) et une médaille de bronze (270.82). “Nostos” de Jean-Michel Blais est une jolie composition au notes de piano en cascade, puis de violon. Elle mériterait une chorégraphie plus travaillée. Voire une chorégraphie tout court. Car si le Japonais est fin technicien, il n’est pas vraiment artiste. Il ne commet qu’une faute, mais de taille : carre douteuse doublée d’une sous rotation avec chute sur quad flip qui est son deuxième élément. Etre tombé ne freine pas son élan : en plus du quad Lutz d’entrée, il égrène comme un métronome quad boucle piqué/triple boucle piqué, quad boucle piqué, triple Axel/Euler/triple Salchow, triple Axel/double Axel en séquence, triple boucle.
Daniel Grassl, déjà en train de tourner sur la glace, se bouche les oreilles à l’annonce des notes de Kevin Aymoz assis dans le Kiss & Cry. Ne pas se laisser perturber, ne pas perdre sa concentration. Si Daniel a progressé sur le plan des composantes, sa technique de saut reste atroce. Il les déclenche un bras devant, l’autre derrière, mains à plats, comme un hiéroglyphe à flanc de pyramide. Dans les rotations, j’ai toujours l’impression que sa tête ne va pas tourner aussi vite que son corps. L’angle que forme sa nuque est anatomiquement impossible chez l’humain. Et rien ne tourne en même temps, bras d’un côté, jambes de l’autre. Pourtant, il parvient à rassembler prestement le tout avant chaque réception. C’est un miracle, et une perpétuelle énigme ! Mais le thème de son libre sur “Billie Eliott” est intéressant. Le programme et la chorégraphie sont bien construits. De plus, Daniel fera aujourd’hui partie des patineurs qui auront commis le moins d’erreurs, avec seulement une sous rotation sur deux de ses trois quadruples. 4ème du libre (173.20), il l’est aussi du classement final (254.96).
Kevin Aymoz, que j’ai rencontré le matin même pour une interview (à lire ici (Opens in a new window)) est en très bonne forme morale et physique. Galvanisé par les acclamations de son public, il veut faire oublier son court criblé de chutes. Son entrée sur la glace fait encore plus de bruit que la veille car la patinoire est pleine à craquer. Les musiques de son libre cette saison sont comme celles des précédentes : à vous prendre les tripes. “Van Gogh” de Virginio Aiello, “Hold on Tight” de Thomas Azier et “Destiny” de Karl Hugo. Kevin veut des musiques qui “parlent” et à travers elle, cet écorché vif parle à tout le monde. Sa combinaison d’entrée quad boucle piqué/double boucle piqué est nickel. La salle hurle. Il retourne son quad boucle piqué solo et son triple Lutz. Les encouragements pleuvent. Il réussit triple Axel/double Axel en séquence. La salle hurle encore. Triple Axel solo : aux petits oignons et aux GOEs à +4. La salle s’enflamme. Triple boucle piqué/Euler/triple Salchow : le Salchow est en sous rotation. Tout le monde s’en fout. Triple flip. Avec “edge” ? On s’en fout encore plus. Les pirouettes et la séquence de pas, semée d’arabesques, de sauts parapluie et de glissades aussi fines que de la dentelle, embarquent tout le monde. On ne s’entend plus penser, on ne respire presque plus. Quand la musique s’arrête, la salle explose. Il serait champion Olympique que ça ne hurlerait pas plus fort. Difficile de ne pas avoir les larmes aux yeux. Cet immense soutien de son propre public est sans doute ce qui peut faire le plus de bien à Kevin. La veille je l’ai fait rire en lui disant qu’il n’y avait que cinq patineurs devant lui et que ces cinq patineurs, ce n’était pas beaucoup, juste le nombre de personnes qui peuvent monter dans sa Twingo. Relativiser, toujours. Le Grenoblois est aujourd’hui aux anges avec sa 5ème place du libre (169.81) et sa 6ème place au total (238.63), même s’il a déjà connu des scores et des places plus élevées. Il vient de terminer sa deuxième Finale de Grand Prix, chez lui., dans sa ville et sur la patinoire de son enfance.
Où est passé Mikhail Shaidorov dans tout cela ? En queue de classement du libre (162.49), après avoir été 3ème du court. Le Kazakh commence par chuter sur son quad Lutz en sous rotation. Il place son arme fatale, triple Axel/Euler/quad Salchow (Base Value 18.20) en deuxième élément, non inscrit à son contenu technique, mais la combinaison est loin d’être propre. Le quad flip est en sous rotation. Le triple boucle est moyen. Le quad boucle piqué/triple boucle piqué est net, mais pas ébouriffant. Sous rotation sur les Axels en séquence. Petit triple Lutz sans amplitude. La Sonate au Clair de Lune de Beethoven et “Take on Me” de A-Ha version épique se sont fâchées en cours de route. Mikhail est 3ème au final (253.75) et très déçu. Il est passé à côté de son programme et d’une médaille de bronze. Ainsi va la compétition…
[Replay programme libre messieurs (Opens in a new window)]
Kate Royan
Résultats et scores détaillés (Opens in a new window)
Bonus :
Programme libre Mao Shimada (Opens in a new window)
Programme libre Amber Glenn (Opens in a new window)
Programme libre Ilia Malinin (Opens in a new window)
Programme libre Yuma Kagiyama (Opens in a new window)
Programme libre Kevin Aymoz (Opens in a new window)