Championnats d’Europe 2025 Tallinn - Court couples : jugement sévère, mais juste.
Dans la brume et la pluie estoniennes, de l’extérieur, la patinoire est un vieux bunker soviétique avec des meurtrières en guise de fenêtres. A l’intérieur, elle est superbe : moderne, lumineuse, joliment décorée. Dix-huit couples européens participent, dont un couple islandais pour la première fois. Ces mêmes Islandais font partie du trio qui n’ouvre pas son programme avec un triple twist, changement bienvenu dans une avalanche de constructions identiques. Gunnarsdottir/Piazza attaquent par un triple boucle piqué, quand les Allemands Roscher/Schuster choisissent le triple flip lancé, et les Italiens Caldara/Maglio le double Axel.
Beaucoup d’erreurs coûteuses pour les meilleurs aujourd’hui, qui sont tous loin de leurs records personnels car les juges ne laissent rien passer. Seuls les Allemands Hase/Volodin ont un programme sans tache, mais un dépassement de temps leur vaut un point de déduction. Ils prennent cependant la tête avec une bonne avance (71.59) sur les Italiens Conti/Macii. Leur “You were Mine” de Tami Nielson est mûr à point et c’est pour moi, de loin, la prestation la plus intéressante de l’après-midi, même si certains GOEs sont bas. Le patinage est fluide, ample, l’expression convaincante. Sara et Niccolo sont moins en verve (68.52) sur leur poussiéreux Carmen, avec un triple boucle lancé retourné et réceptionné sur deux pieds. Le triple twist, heurté en descente, leur vaut un petit niveau 2. Les Hongrois (en fait Russes) Pavlova/Sviatchenko, qui comptent Fedor Klimov parmi leurs entraîneurs, continuent leur petit bonhomme de chemin : 5èmes en 2023, 4èmes en 2024, ils sont provisoirement 3èmes avec 65.88. Leur performance, sur “Kiss” et “Sex Bomb” de Tom Jones en version ralentie, est celle de bons élèves, mais plutôt basique, avec un manque d’effort chorégraphique. Le triple flip lancé est atterri une main parterre, mais il est aussi lancé par Alexeï d’une seule main, ce qui en augmente la difficulté.
J’ai un faible pour les Britanniques Vaipan-Law/Digby (4èmes, 64.82). Tout est net même si les GOEs montent peu. Le choix de leur thème, utilisé par les monstres de la discipline qu’étaient Savchenko/Massot est, du coup, un peu risqué. Ils s’en sortent avec beaucoup d’envie et de panache. Il reste du travail à effectuer sur les composantes. Tout vient à point à qui sait attendre (nous) et à qui sait travailler (eux). Hocke/Kunkel sont toujours aussi dynamiques et rapides, mais les voici bien en dessous de leur Season Best (67.37) avec 62.68. Un triple Salchow réceptionné sur le quart et deux mains sur la glace à l’arrivée du triple boucle lancé coûtent cher. “I Love Rock n’Roll” de Joan Jett et “Black Betty” de Ram Jam réveillent la patinoire aux gradins clairsemés (nous sommes en pleine semaine…)
Ghilardi/Ambrosini s’offrent une tristounette 6ème place (60.95), très loin de leur niveau. Leur “Tango de Roxanne” me sort littéralement par les yeux et les oreilles, pourtant ils y mettent du coeur, comme toujours. Mais deux grosses erreurs viennent les handicaper : un simple Axel (donc invalidé), particulièrement laid, exécuté par Rebecca au lieu d’un double, qui pose ensuite les deux mains à la réception du triple boucle lancé. Les Polonais Chtchetinina/Wozniak effectuent un programme correct, volontaires et sereins sur “Moderation” de Florence & the Machine. La réalisation manque de liant entre les deux patineurs, mais ils déploient une énergie louable bien qu’un peu brouillonne (7èmes, 60.31). Derrière eux, Camille et Pavel Kovalev (dont les speakers estoniens annoncent le nom à la Russe, “Kovalov”) commencent assez mal leur programme avec un triple twist niveau 1 aux trois quarts loupé, et un double boucle piqué pour Camille pendant que Pavel effectue ses trois tours. Mais le couple français ne se laisse pas abattre, et la seconde partie de leur performance est beaucoup plus agréable (8èmes, 57.13). Ils s’offrent le luxe de battre Metelkina/Berulava (57.03), ou plutôt ce sont les Géorgiens qui se battent tous seuls. Leur court est déjà une espèce d’hérésie de genre qu’on ne sait toujours pas à quel degré prendre. Quand, en plus, il comporte de grosses erreurs… Le triple flip lancé est touché en réception. Anastasiia tombe sur le triple Salchow et à partir de là, le couple perd ses moyens, au point de se retrouver avec une Death Spiral invalidée. Personne ne les attendait en 9ème position, surtout pas eux-mêmes, et, avec un tel retard, la remontée dans le libre sera difficile.
Kate Royan
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