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Oubliez l’indépendance énergétique. Le commerce transcontinental est la clé d’un réseau d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelable.

Pour la première fois, une équipe de recherche a montré comment les réseaux communs peuvent rendre l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelable totalement fiable et économiquement viable, et ce, sans recourir à aucune technologie de stockage à long terme.

Par Sarah DeWeerdt (Abre numa nova janela)

Les sources d’énergie renouvelable, comme le solaire ou l’éolien, fluctuent énormément dans le temps (la nuit, il n’y a pas de soleil), mais aussi dans l’espace (certains endroits sont plus venteux que d’autres). Cette variabilité représente un obstacle de taille au passage à un réseau d’électricité provenant entièrement de sources d’énergie renouvelable. Selon une récente analyse, toutefois, si on transporte l’électricité sur des lignes à grande vitesse à l’échelle du continent, les sources d’énergie renouvelable pourraient répondre facilement à l’ensemble de la demande mondiale d’électricité.

Le commerce transcontinental de l’électricité n’est pas une idée nouvelle. Il existe des réseaux régionaux en Europe, en Amérique du Nord et en Afrique du Sud (Abre numa nova janela), et des lignes de transport qui relient le Royaume-Uni et les Pays-Bas, la Suède et la Lituanie, et la Norvège et les Pays-Bas, par exemple. L’originalité de l’étude vient du fait que, pour la première fois, on étudie la mise à profit de ces infrastructures, sur le plan commercial, pour créer un réseau d’électricité produite entièrement à partir de sources d’énergie renouvelable à une échelle qui permet une gestion efficace de l’offre comme de la demande, le tout en tenant compte de l’espace limité disponible pour le développement des énergies renouvelables.

À partir de données et de modèles existants, l’équipe de recherche a analysé la demande d’électricité et l’offre d’énergies renouvelables heure par heure pour l’année 2050, à l’échelle mondiale. On a calculé la disponibilité et le coût de l’électricité si chaque pays en produisait et en consommait uniquement à l’intérieur de ses propres frontières, par rapport à une situation où l’électricité serait librement échangée au sein de six grandes régions du monde : Afrique subsaharienne; Asie de l’Est, du Sud et centrale et Russie; Europe, Moyen-Orient et Afrique du Nord; Amérique du Nord; Amérique du Sud; et Asie du Sud-Est et Océanie.

Si tous les sites exploitables pour le développement des énergies renouvelables sont utilisés, la totalité de l’électricité produite à l’intérieur des frontières de chaque pays (Abre numa nova janela) répondrait à 98 % de la demande mondiale en 2050. Cela dit, le commerce transcontinental viendrait réduire le coût de l’électricité par une marge allant de 5 à 52 %, selon la région, rapporte l’article publié dans la revue Nature Communications.

Dans les faits, tous les sites exploitables ne sont pas propices au développement des énergies renouvelables. L’équipe de recherche a donc voulu savoir ce qui se passerait si seulement 10 % des sites les plus propices au développement des énergies renouvelables étaient exploités à l’échelle mondiale. L’importance cruciale du commerce international de l’électricité est alors ressortie clairement.

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Dans ce scénario, qui tient compte de la limite spatiale, l’électricité produite à l’intérieur des frontières de chaque pays ne répondrait qu’à seulement 88 % de la demande annuelle mondiale. Dans près d’un tiers des pays, les sources d’énergie renouvelable ne permettraient de produire qu’au plus 80 % de l’électricité nécessaire.

Avec des réseaux communs transcontinentaux, les énergies renouvelables pourraient aisément répondre à la demande d’électricité, même si l’espace qui leur est dévolu est restreint. De plus, le commerce rendu possible par ces réseaux permettrait de diminuer le coût de l’électricité d’une proportion allant jusqu’à 23 % par rapport au scénario où les productions nationales sont cloisonnées.

« Selon notre analyse, il est possible de produire intégralement l’électricité à partir de sources renouvelables de manière fiable et économiquement viable, sans recourir à des technologies de stockage à long terme, en étendant les lignes de transports à l’échelle des continents », indique l’équipe de recherche.

En 2020, seulement 2 % de l’approvisionnement total en électricité a fait l’objet d’échanges transfrontaliers à l’échelle mondiale. D’après cette nouvelle étude, si tous les sites pouvant être exploités pour le développement des énergies renouvelables l’étaient, les échanges transfrontaliers d’électricité répondraient à environ 16 % de la demande mondiale, un chiffre qui grimperait à environ 30 % si on concentrait ce développement sur les meilleurs sites.

La répartition inégale des énergies renouvelables sur la planète rappelle la concentration des réserves de combustibles fossiles dans certains pays. Dans l’économie actuelle, fondée sur ces combustibles, cette asymétrie est surtout avantageuse pour les pays qui les exportent, parce qu’ils en tirent des profits immenses, sans compter que le fait d’avoir le monopole de ces ressources leur confère une influence géopolitique considérable.

Dans ce contexte, on voit souvent les énergies renouvelables comme un moyen (Abre numa nova janela) de parvenir à l’indépendance énergétique (Abre numa nova janela). Cette nouvelle analyse déboulonne ce mythe en avançant qu’une intégration internationale accrue – et non moindre – doit être au cœur de la transition verte. « La géopolitique pourrait faire obstacle à la création de réseaux énergétiques transcontinentaux », estime l’équipe de recherche.

Or, ces réseaux sont avantageux pour tous. Ainsi, les pays qui importent de l’électricité verte n’ont pas à assumer le coût du développement de projets d’énergies renouvelables – coût qui peut être rebutant – ou à investir dans de coûteux systèmes de stockage par batterie. Du côté des nombreux pays exportateurs, s’ils pouvaient vendre leur électricité excédentaire au sein d’un réseau, ils ne seraient pas forcés de limiter leur production, ce qui stimulerait l’économie du développement des énergies renouvelables. « La mise en place de réseaux transcontinentaux devrait profiter à la fois aux importateurs et aux exportateurs d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelable », affirme l’équipe de recherche.

Source : Yang H. et coll. « Global transcontinental power pools for low-carbon electricity (Abre numa nova janela) ». Nature Communications. 2023.

Article original en anglais : https://www.anthropocenemagazine.org/2024/01/forget-energy-independence-the-secret-to-a-renewable-grid-lies-in-transcontinental-electricity-trading/ (Abre numa nova janela)

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Anthropocène est la version française d’Anthropocene Magazine (Abre numa nova janela). La traduction française des articles est réalisée par le Service de traduction de l’Université Concordia (Abre numa nova janela), la Durabilité à l’Ère Numérique (Abre numa nova janela) et le pôle canadien de Future Earth (Abre numa nova janela).

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