La plupart des politiques climatiques échouent, mais une poignée de politiques gagnantes pourraient combler l’écart en matière d’émissions de gaz à effet de serre
Une nouvelle analyse s’appuie sur une base de données exhaustive de 1 500 politiques climatiques mises à l’essai dans le monde entier.
Par Sarah DeWeerdt (Si apre in una nuova finestra)
Selon une nouvelle étude, seule une poignée des centaines de politiques climatiques mises en œuvre dans le monde au cours des deux dernières décennies ont permis de réduire notablement les émissions. L’analyse a également permis de recenser les approches les plus efficaces pour réduire les émissions dans différentes industries et conditions économiques, fournissant ainsi une feuille de route pour de futures améliorations.
Les efforts déployés par les pays pour réduire les émissions de gaz à effet de serre risquent d’être nettement insuffisants pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, avec un écart estimé à 23 milliards de tonnes métriques de dioxyde de carbone d’ici 2030. Cela s’explique à la fois par l’absence d’engagements assez ambitieux (Si apre in una nuova finestra) et par le résultat souvent décevant des politiques mises en place par les pays.
Jusqu’à présent, il n’y a guère eu de consensus sur les politiques climatiques qui réduisent le plus efficacement les émissions à grande échelle. Les recherches passées sur l’efficacité des politiques climatiques ont eu tendance à se concentrer sur quelques politiques bien connues, ce qui laissait en plan des centaines d’autres politiques.
Dans la nouvelle étude, les scientifiques ont exploité une base de données extrêmement complète sur les politiques climatiques, récemment constituée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). L’équipe de recherche a analysé les effets de 1 500 politiques climatiques instaurées entre 1998 et 2022 dans 41 pays collectivement responsables de plus de 80 % des émissions mondiales.
La base de données comprend 48 types de politiques climatiques distinctes, allant des codes de construction écoénergétique et autres réglementations aux subventions pour l’achat de produits respectueux du climat, en passant par les taxes sur le carbone.Elle couvre l’introduction de nouvelles politiques ainsi que le resserrement des politiques existantes, et saisit l’effet de séries de politiques mises en œuvre à peu près au même moment.
En raison de la multitude de politiques et de combinaisons en jeu, les scientifiques ont adopté une approche d’apprentissage automatique pour leur analyse, en employant une version d’une technique statistique couramment utilisée pour estimer l’effet causal d’une intervention.
Seules 63 des 1 500 interventions politiques ont effectivement produit une réduction appréciable des émissions de carbone, comme l’ont indiqué les scientifiques dans un article publié dans la revue Science.
La plupart des réussites ont été obtenues par la combinaison d’au moins deux politiques (Si apre in una nuova finestra). D’ailleurs, l’analyse suggère que la combinaison de politiques a souvent été plus efficace que les mesures isolées, contrairement à certains arguments selon lesquels il s’agirait d’une redondance, voire d’un excès.
Par exemple, les subventions ou les réglementations seules ne fonctionnent pas. Elles doivent être combinées avec des instruments basés sur les prix comme les taxes sur le carbone et l’énergie. L’interdiction pure et simple des centrales électriques au charbon ou des voitures à moteur à combustion n’a pas permis de réduire les émissions, mais une telle mesure peut être efficace lorsqu’elle est associée à des taxes ou à des incitations financières (comme c’est le cas pour les centrales au charbon au Royaume-Uni et les voitures en Norvège).
« Dans la plupart des cas, nous avons constaté que les effets sont plus importants si un instrument politique fait partie d’un ensemble de mesures par opposition à une mise en œuvre isolée », ont écrit les scientifiques. L’analyse met en évidence le rôle de politiques moins médiatisées dans les réussites en matière de réduction des émissions, qui étaient auparavant attribuées à des politiques uniques.
Par exemple, la réduction des émissions du secteur de l’électricité au Royaume-Uni au milieu des années 2010 n’est pas uniquement due à l’introduction d’un prix plancher du carbone, comme on le suppose généralement, mais à une série de politiques mises en œuvre à la même époque. Au milieu de la dernière décennie, les réductions d’émissions dans le secteur industriel chinois ne sont pas seulement attribuables à l’avènement des systèmes d’échange de quotas d’émission, mais aussi à la réduction des subventions aux combustibles fossiles et au renforcement des mesures visant à encourager les investissements dans l’efficacité énergétique.
Les résultats précisent les meilleurs moyens de réduire les émissions dans les secteurs du bâtiment, de l’électricité, de l’industrie et des transports, tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement. En théorie, la transposition à plus grande échelle de ces politiques couronnées de succès pourrait combler l’écart en matière d’émissions. Les chercheurs ont également créé un site web interactif, le Climate Policy Explorer (Si apre in una nuova finestra), où le public peut consulter les méthodes et les résultats de l’analyse.
Source : Stechemesser A. et coll. Climate policies that achieved major emissions reductions: Global evidence from two decades (Si apre in una nuova finestra). Science 2024
Article original en anglais : https://www.anthropocenemagazine.org/2024/09/most-climate-policies-flop-but-a-handful-of-winners-could-actually-close-the-emissions-gap/ (Si apre in una nuova finestra)
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Anthropocène est la version française d’Anthropocene Magazine (Si apre in una nuova finestra). La traduction française des articles est réalisée par le Service de traduction de l’Université Concordia (Si apre in una nuova finestra), la Durabilité à l’Ère Numérique (Si apre in una nuova finestra) et le pôle canadien de Future Earth (Si apre in una nuova finestra).