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Les fermes florales pourraient nettoyer les cours d’eau pollués, selon des scientifiques

Des expériences ont montré que les fermes flottantes de fleurs coupées fonctionnent comme les plantes des zones humides naturelles en absorbant l’excès de phosphore et d’azote, tout en produisant jusqu’à 63 fleurs (d’une valeur d’un dollar chacune) par mètre carré.

Par Warren Cornwall (Opens in a new window)

Les engrais sont à la fois un atout et une nuisance. Sur les terres agricoles, ils contribuent à maintenir les cultures qui nourrissent le monde. Mais lorsque ces mêmes nutriments, tels que l’azote et le phosphore, se déversent dans les rivières, les lacs et les mers des environs, ils favorisent la prolifération d’algues qui peuvent étouffer les écosystèmes et créer des zones mortes à faible teneur en oxygène.

Certains scientifiques tentent de s’attaquer à cette pollution en fusionnant ces deux mondes, c’est-à-dire en transposant les cultures dans l’eau. De récentes recherches donnent à penser que cette approche peut s’avérer viable, rentable et même colorée lorsqu’on transforme les cours d’eau en fermes florales.

« C’était incroyable », déclare Jazmin Locke-Rodriguez, chercheuse postdoctorale à l’Université internationale de la Floride, dans une vidéo YouTube (Opens in a new window) consacrée à ces travaux. « Plus les plantes grandissaient, plus l’eau était propre ».

Les recherches de Mme Locke-Rodriguez s’inspirent de la nature : les plantes des marais agissent comme des éponges naturelles, piégeant et absorbant les nutriments présents dans l’eau. Mais avec la disparition des zones humides sous le pavage et les niveaux anormalement élevés de nutriments provenant des champs agricoles, ces systèmes naturels sont souvent débordés.

Le sud de la Floride illustre parfaitement ce problème. L’agriculture et le développement ont tous deux grugé les zones humides de la région. Par ailleurs, les nutriments tels que le phosphore provenant de la culture de la canne à sucre dans les Everglades menacent depuis longtemps les écosystèmes environnants. Si le problème s’est atténué, les défenseurs de l’environnement demeurent préoccupés (Opens in a new window) par le fait qu’il n’est pas suffisamment bien contrôlé. En 2020, la situation s’est ainsi aggravée lorsqu’une zone à faible teneur en oxygène s’est formée dans la baie de Biscayne, à Miami, entraînant la mort de plus de 20 000 poissons (Opens in a new window).

C’est là qu’intervient Jazmin Locke-Rodriguez, avec ses tapis flottants en plastique constellés de trous assez grands pour supporter une plante à fleurs dont les racines pendent dans l’eau. Ces tapis peuvent être placés dans des étangs artificiels et des canaux où s’écoulent les eaux pluviales chargées de nutriments. « Les fleurs fonctionnent comme les plantes des zones humides naturelles. La seule différence est qu’elles ne sont pas enracinées dans le sol », explique la chercheuse.

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Toutefois, ce n’est pas parce qu’une solution est possible que tout le monde l’adoptera. Mme Locke-Rodriguez voulait voir si les tapis pouvaient être implantés en tablant sur l’industrie des fleurs ornementales en Floride. Elle a donc commencé à faire du jardinage hydroponique avec des fleurs.

Ses collaborateurs et elle ont planté cinq sortes de fleurs différentes – deux types de zinnias, deux tournesols et un souci géant Coco Gold – dans les tapis flottants, suspendus dans des réservoirs en plastique de 2 300 litres contenant de l’eau additionnée de phosphore et d’azote. Pendant 12 semaines, ils ont suivi l’évolution de chacune des espèces, ainsi que la quantité de nutriments absorbés par les plantes dans l’eau.

À la fin, les soucis jaunes étaient les champions incontestés. Les tournesols ont fleuri tôt et étaient rabougris, indiquant que le stress lié à la transplantation ou aux conditions de croissance était trop grand. Les systèmes racinaires des zinnias ont eu du mal à s’ancrer dans les tapis minces, ce qui les a fait tomber dans l’eau. Les champignons et les chenilles les ont achevés.

La plupart des soucis, en revanche, semblaient très heureux. Ils ont vu leur taille multipliée par cinq au cours des trois mois, passant de 14 à 79 centimètres en moyenne. Ils ont évité de tomber en produisant davantage de racines latérales. Seulement 20 % des plantes n’ont pas survécu, après avoir été éclipsées par leurs congénères plus grandes. Les soucis ont produit 63 fleurs par mètre carré, d’une valeur d’à peu près un dollar par fleur, selon les estimations des scientifiques.

Les fleurs en croissance ont également eu des incidences bénéfiques sur l’environnement. Les plantes ont en effet capturé quelque 50 % plus de phosphore et 33 % plus d’azote que dans les bassins où la seule croissance végétale était celle des algues naturelles, comme l’ont rapporté les scientifiques l’été dernier dans la revue Environmental Advances (Opens in a new window).

« Nos résultats prometteurs montrent que les fermes flottantes de fleurs coupées pourraient s’avérer une option durable pour atténuer la pollution de l’eau », ont écrit Mme Locke-Rodriguez et Krishnaswamy Jayachandran, professeur à l’Université internationale de la Floride, dans la revue The Conversation (Opens in a new window).

Jazmin Locke-Rodriguez évalue à présent la possibilité d’élargir la portée de cette approche pour réduire la pollution de l’eau dans la région. Elle teste des systèmes de tapis plus grands dans les canaux de Coral Gables et de Little River.

Peut-être pourra-t-on un jour transformer l’eau polluée en or florissant. D’ici là, laissons aux services de marketing le soin de trouver comment rendre attrayantes les fleurs cultivées dans les eaux pluviales.

Source : J. Locke-Rodriguez et coll. « Floating flowers: Screening cut-flower species for production andphytoremediation on floating treatment wetlands in South Florida ». Environmental Advances. 21 juillet 2023.

Article original en anglais : https://www.anthropocenemagazine.org/2024/03/flower-farms-could-clean-up-polluted-waterways-scientists-show/ (Opens in a new window)

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Anthropocène est la version française d’Anthropocene Magazine (Opens in a new window). La traduction française des articles est réalisée par le Service de traduction de l’Université Concordia (Opens in a new window), la Durabilité à l’Ère Numérique (Opens in a new window) et le pôle canadien de Future Earth (Opens in a new window).

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