Quatre messages sur le climat ont été proposés à des investisseurs. Un seul d’entre eux les a incités à investir dans le vert.
Une équipe de recherche a testé différentes manières d’expliquer à un groupe de spécialistes chevronnés de la finance la nécessité de réaliser des investissements respectueux de l’environnement. Seul l’optimisme a fait bouger les choses.
Par Sarah DeWeerdt (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre)
Selon une nouvelle étude, des messages optimistes mettant l’accent sur les avantages à long terme de l’abandon des combustibles fossiles pourraient accroître le volume des richesses gérées de façon durable (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) de l’ordre de 3,6 billions de dollars américains.
Cette découverte offre une solution de rechange aux messages alarmistes sur le changement climatique qui prévalent dans les médias, mais qui n’ont jusque-là pas réussi à susciter un désinvestissement substantiel par rapport aux combustibles fossiles : à l’heure actuelle, seulement 36 % des actifs gérés à l’échelle mondiale sont investis de manière responsable.
« Il est peu probable que la crise [climatique] s’atténue tant que le monde continuera à financer collectivement l’extraction et l’utilisation de combustibles fossiles », affirme l’équipe de recherche dans un article publié dans la revue Scientific Reports. « Un changement radical dans les choix d’investissement est nécessaire. »
Dans cette nouvelle étude, l’équipe de recherche a demandé à 335 spécialistes en placements participant à une conférence australienne en ligne de constituer un portefeuille d’investissement hypothétique en répartissant l’argent selon quatre options – deux options conventionnelles et deux options axées sur des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).
Les chercheurs voulaient évaluer l’effet de la façon dont l’information est présentée ou dont les messages sont cadrés sur les choix en matière d’investissement. Des recherches avaient déjà montré que le cadrage des messages pouvait avoir une incidence sur le comportement des gens dans d’autres contextes, mais peu d’études concernaient les messages destinés aux spécialistes de l’investissement qui jouent un rôle majeur dans le financement des projets d’exploitation des combustibles fossiles (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre).
L’équipe de recherche a présenté le portefeuille hypothétique en s’appuyant sur l’une des quatre approches suivantes : un cadre de « norme sociale », dans lequel on insiste sur le fait que la plupart des investisseurs reconnaissent que les placements dans les combustibles fossiles sont indésirables; un cadre d’« optimisme », qui compare les coûts temporaires du désinvestissement avec le potentiel de croissance à long terme des actifs à faible teneur en carbone; un cadre de « messager », dans lequel une personnalité réputée donne son avis en faveur du désinvestissement; et un cadre de « contrôle », qui met en garde contre les risques de continuer d’investir (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) dans les combustibles fossiles, comme le font les messages actuels axés sur le pessimisme.
Les personnes participant à l’étude avaient toutes exprimé leur intention d’accroître les investissements ESG au cours de la prochaine décennie. Selon l’équipe de recherche, cela devait les rendre plus sensibles aux messages sur le changement climatique.
Or, le cadrage demeure important. Le cadre d’« optimisme » a en effet donné lieu à une hausse de la part des investissements ESG dans le portefeuille des participants de 3,6 % par rapport au cadre de « contrôle ». Dans le monde réel, un effet de cette ampleur pourrait augmenter de 3,6 billions de dollars US les actifs gérés de manière responsable.
« Les résultats sont particulièrement frappants, parce qu’ils montrent qu’une communication optimiste sur le climat est efficace auprès de spécialistes hautement analytiques et comptant en moyenne 19 ans d’expérience dans les placements », indique dans un communiqué de presse (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) Danielle Kent (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre), de la Business School de l’Université de Sydney, en Australie, et membre de l’équipe de l’étude. « On suppose généralement que ces investisseurs chevronnés ne peuvent être influencés, mais nous avons observé une augmentation statistiquement significative des décisions de placement respectueuses de l’environnement. »
En revanche, les cadres de « norme sociale » et de « messager » n’ont pas convaincu les investisseurs d’accroître leurs placements responsables.
Les résultats donnent à penser que les investisseurs professionnels réagiront mieux à une stratégie de communication axée sur l’investissement responsable qu’aux avertissements alarmistes qui constituent actuellement la norme. « Au lieu de se concentrer sur les répercussions du réchauffement climatique, les messages incitant à faire des placements responsables devraient mettre de l’avant le caractère permanent des avantages qui en découleront : écosystèmes florissants, amélioration de la longévité et de la santé, prospérité économique partagée, sécurité mondiale accrue, etc. », conclut Danielle Kent.
Source : Daugaard D. et coll. « Optimistic framing increases responsible investment of investment professionals (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) », Scientific Reports, 2024.
Article original en anglais :
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Anthropocène est la version française d’Anthropocene Magazine (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre). La traduction française des articles est réalisée par le Service de traduction de l’Université Concordia (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre), la Durabilité à l’Ère Numérique (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) et le pôle canadien de Future Earth (S'ouvre dans une nouvelle fenêtre).